Christian Giudicelli, fondateur de VOLTAÏCA, revient sur son parcours d’ingénieur devenu entrepreneur dans le secteur des énergies renouvelables. Il raconte la naissance d’un projet familial ambitieux, les enjeux d’une croissance rapide et d’un modèle basé sur la production d’électricité verte.
Entre vision long terme, internationalisation et recrutement, il partage les coulisses de cette aventure engagée.
Est-ce que vous pouvez vous présenter et présenter VOLTAÏCA ?
Je suis Christian Giudicelli, ingénieur en aérospatial de formation. J’ai travaillé pour le groupe Airbus pendant 7 ans, puis j’ai démissionné pour entreprendre. J’ai créé VOLTAÏCA, qui est la première société du groupe familial que nous avons ensuite créée avec mon frère, Jean-Marc.
VOLTAÏCA est basée à Bastia et nous avons des bureaux à Nice et Toulouse, avec une présence nationale des chargés d’affaires qui maillent tout le territoire français. Nous sommes aussi présents en Italie : on va inaugurer nos bureaux à Padoue et Milan le mois prochain. C’est notre premier pas à l’international.
Notre activité s’est concentrée jusqu’à aujourd’hui, sur le photovoltaïque en toitures : soit on solarise des toitures existantes, soit on construit des bâtiments qu’on offre en tout ou partie à des agriculteurs, en contrepartie de quoi on exploite la toiture sur plusieurs décennies.
Nous lançons aussi notre gammes d’ombrières, en partenariat avec Steelgo, une autre filiale du Groupe que nous avons racheté et qui est un charpentier métallique basé en Vendée.
Nous sommes aussi intéressés par des centrales au sol, petites ou grandes, et étudions la possibilité de faire autre chose, comme du stockage, qui est clairement LE sujet d’avenir. Il est possible de s’en passer aujourd’hui, mais plus pour longtemps… Il faudra stocker l’énergie produite pour éviter les heures négatives et autres contraintes liées à l’intermittence des énergies renouvelables (dans l’éolien, pas de vent, pas d’électricité ; dans le photovoltaïque, pas de soleil, pas d’électricité… Ou de l’électricité quand on n’en a pas besoin !). Tout ça doit être géré avec un tampon, une méthode de stockage.
Historiquement, nous étions « développeurs pour compte de tiers » : on développait des centrales photovoltaïques que nous revendions à des investisseurs par exemple. C’est un système de « vente » classique, on génère du cash. Nous avons ensuite décidé de devenir producteur indépendant d’électricité. L’objectif est différent : il s’agit de garder toutes les centrales que nous développons. Le business model change : nous consommons du cash au départ, puisqu’il faut investir dans les centrales qu’on développe.
C’est pour cela que l’on prépare une levée de fonds de 30 millions d’euros dans le cadre d’une augmentation de capital.
L’objectif de cette levée de fonds, c’est quoi exactement ?
Investir. Dans les effectifs : nous sommes une cinquantaine de CDI et une centaine de chargés d’affaires. Cette taille de maturité ne nous exempte pas d’aller chercher des compétences spécifiques.
Et surtout, investir dans de nouveaux projets et pouvoir détenir des actifs de production d’électricité. Notre vision à 2030, c’est d’avoir un gigawatt de projets en développement, tous projets confondus, quel que soit leur stade d’avancement.
Vous avez monté cette entreprise en famille. Qu’est-ce que cela change, notamment pour les collaborateurs ?
Déjà, il faut en avoir la volonté. J’ai la chance de très bien m’entendre avec mon unique frère. Ça résout une partie de l’équation. Ensuite, la particularité d’une société familiale, c’est qu’elle s’inscrit dans le temps. On n’est pas là pour faire des “coups”. On est là pour bâtir une vraie entreprise dans la durée. Bien sûr, il faut aller vite, surtout en hyper croissance, car c’est dangereux si on ne se structure pas assez vite. Mais on a une visibilité long terme. Mon plan de développement est sur plusieurs décennies.
Warren Buffett vient de prendre sa retraite à 94 ans… Je me demande parfois où je serai au même âge. L’idée, au-delà du plaisir de créer, c’est de transmettre à mes enfants. Ils en feront ce qu’ils veulent. Je ne leur dirai pas “tu seras entrepreneur”. Au pire, ils hériteront d’actions et il y aura un directeur général. Ce n’est pas le pire héritage — sauf s’il y a des dettes.
Et vis-à-vis des équipes : ils savent qu’on est dans une approche bienveillante. Mais je précise toujours que la bienveillance va dans les deux sens. Nous aussi on a nos émotions et du stress. Et c’est important de le dire.
Quel regard portez-vous sur le secteur de l’énergie ?
La conjoncture est difficile, on a connu mieux. La situation géopolitique est globalement anxiogène. Mais bon… Un entrepreneur, c’est un challenger. Si on n’aime pas les challenges et les risques, on n’entreprend pas. Notre approche, c’est de dire « ok, là on est dans un creux, mais c’est cyclique ». Il y a des creux, il y a des vagues… Et il faut tenir.
Quant au secteur… L’électricité n’est pas une énergie en soi, c’est un vecteur. Il faut bien une source d’énergie, qu’elle soit fossile, nucléaire ou renouvelable, pour produire l’électricité. Nous faisons le pari du renouvelable, sans dire qu’on est contre le nucléaire. Nous en avons profité pendant des décennies ! Personnellement, je pense que la France a tout intérêt à garder ses compétences dans le nucléaire. C’est une énergie incroyable en termes de densité et de puissance. Il faut en maîtriser les risques, la technologie, son efficience…
La stratégie du mix est pertinente. Le nucléaire, c’est très long à développer. Le renouvelable, avec la volonté de faire, est plus rapide.
Le sens de l’histoire, me semble-t-il, c’est d’aller vers une décarbonation. La population augmente, les usages sont de plus en plus électriques. Même si on atteint un plateau, comme certains le disent, ça n’enlève rien à la nécessité d’anticiper. Et le rôle d’un gouvernant, c’est d’anticiper. Si on pense qu’en maintenant un plateau, on prépare l’avenir, on se trompe. Il faut poursuivre le développement des énergies. Toute économie et toute production commencent par un besoin d’énergie. On est sur un secteur qui, sur le fond et dans la durée, ne peut pas connaître la crise. Sauf si une technologie disruptive, qu’on ne connaît pas encore, apparaît…
Comment gérez-vous la phase d’hypercroissance et le recrutement ?
C’est un vrai sujet. Les premières embauches se font sans trop savoir comment s’y prendre : on poste une annonce sur LinkedIn, on reçoit des candidatures, parfois ça marche, parfois non… Puis on apprend.
On a fait appel à des cabinets de recrutement et on a créé notre propre équipe RH avec des recruteurs en interne. Ça ne veut pas dire que ça fonctionne toujours.
Dans une entreprise en hypercroissance, certaines personnes peuvent ne plus être alignées avec les nouveaux enjeux. En tant que dirigeant, il faut parfois prendre des décisions difficiles pour faire évoluer l’équipe.
Et encore une fois, l’entrepreneuriat en hypercroissance, ce sont des tempêtes en permanence. Certains sont excités par ce challenge, d’autres non. Même parmi les meilleurs, il y en a qui ont d’autres ambitions. La nôtre, c’est d’affronter la tempête encore quelques années. Ce qui est certain, c’est qu’un chef d’entreprise ne peut pas revoir ses ambitions en fonction des ambitions des autres.
C’est une gestion humaine assez compliquée. C’est un sujet permanent qui passe aussi par des échanges, des enquêtes, des sondages : la qualité de vie au travail, comment les équipes vivent les choses…
Est-ce que vous avez une actualité à partager sur VOLTAÏCA ?
On a embauché, il y a plus de six mois, une Directrice Générale qui vient d’Engie Green. Elle apporte des process, elle améliore les choses et elle le fait très bien jusque-là. C’est un vrai tournant dans la vie de VOLTAÏCA.
Et comme je le disais, l’internationalisation. Au-delà de la France et de l’Italie, on a vocation à se développer là où les opportunités seront qualitatives. Toujours avec ce business model d’être producteur d’électricité et de revendre cette production selon les pays, les opportunités, l’organisation… In fine, c’est le consommateur final qui bénéficiera de l’électricité verte que nous produisons.
Un conseil pour les candidats qui souhaitent vous rejoindre ?
S’ils aiment le challenge et l’idée d’un projet d’entreprise en pleine construction, avec l’ambition d’aller très haut, très loin, à l’international, ils sont les bienvenus — à condition qu’ils aient les compétences que l’on recherche, bien sûr.
La porte est grande ouverte pour les aventuriers compétents.